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Instagram : le futur magazine féminin version 2.0 ?

Publié le 15/06/2020
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Début 2020.

Coup de tonnerre sur la planète presse féminine ! Glamour, alors dans nos kiosques français depuis plus de 16 ans, s’apprête à fermer boutique après l’édition d’un dernier numéro, prévu à l’été. Déjà en sursis depuis quelques temps à cause de ses faibles ventes, ce magazine féminin n’aura pas réussi à surmonter les difficultés et tire sa révérence.

A vrai dire, cette nouvelle est à peine une surprise : Condé Nast essayait depuis plus de deux ans de relancer son magazine, changeant la formule qui avait fait sa réussite, investissant sur le Digital… En vain.

Comment Glamour, autrefois un « must-read » pour les femmes de 25 à 45 ans, en est-il arrivé là ?

Les années 2000-2010.

Après son introduction en France en 2004, Glamour est à son apogée ! Reconnu parmi ses pairs Elle, Vogue ou encore Cosmopolitan, Glamour a réussi à se tisser une clientèle solide, qui n’achète le magazine pas seulement en lecture de plage.  Ce qui plaît : une ligne éditoriale jeune et décontractée, véritable signature du magazine pendant cinq ans.

Mais au 21ème siècle, tout va très vite ! Les réseaux sociaux, de plus en plus présents, dictent les mœurs, qui évoluent constamment et demandent un perpétuel changement. En 2018, Condé Nast décide de diminuer les parutions, au profit du Digital, mais cela ne relance pas la belle mécanique des années passées. Et, alors que Glamour se démarquait avec ses belles photos axées sur les tendances mode et beauté du moment, le journal est peu à peu tombé en désuétude.

La faute à qui ? Instagram et sa montée d’influence ses dernières années, surtout auprès des jeunes, propulsant le réseau social rose comme roi de la photo ! Créé en 2010, « Insta » s’est imposé comme une application phare de notre mobile, qui lui nous suit partout dans notre quotidien.

Aujourd’hui, les mannequins et hit girls ne se mesurent plus au nombre de parutions dans des magazines de mode mais à leur nombre d’abonnés et de « j’aime » sur leurs publications ou vues sur leur stories (courtes vidéos diffusées pendant 24h). De venues des influenceuses, blogueuses ou youtubeuses, les réseaux sociaux sont un vrai terrain de jeu. Les lectrices à l’affût des dernières tendances n’ont plus besoin de se rendre chez le marchand de journaux, un seul coup d’œil dans leur application favorite leur suffit.

Et Glamour, comme une grande partie de la presse papier, rejoint la liste des « victimes » d’une révolution numérique où l’image et l’instantanéité sont reines.

Instagram : une ascension fulgurante.

Comment Instagram a réussi à détrôner ces magazines en quelques années ?

Qu’il s’agisse de la photo d’un brunch, d’un produit de beauté, d’une tenue, d’un événement ou d’un beau paysage, on se pose souvent la même question : est-ce instagrammable ? Si ce mot a fait son apparition dans notre langage courant, c’est que le réseau social a réussi à s’imposer dans le dialogue sociétal, et il ne serait d’ailleurs pas étonnant de voir ce mot apparaître dans nos dictionnaires.

En quelques années, Instagram est devenu un réseau social incontournable, rivalisant avec le tout-puissant Facebook au point que celui-ci le rachète en 2012 pour la modique somme de 1 milliard de dollars. Aujourd’hui, l’entreprise est estimée à 100 milliards selon Bloomberg.

Les chiffres vertigineux du réseau social  

Instagram, dit « Insta » pour les intimes, compte aujourd’hui 1 milliard d’utilisateurs mensuels, soit 10 fois plus qu’en 2013, et 500 millions de connexions quotidiennes ! Cela le propulse comme deuxième réseau social le plus utilisé après Facebook, en une plateforme qui se veut davantage jeune avec 70% des utilisateurs qui ont moins de 35 ans. 25 millions sont des comptes Instagram professionnels, où les influenceurs cohabitent avec de grandes marques.

Selon un sondage Diplomeo, le réseau social au logo rose serait même devenu le préféré des français de 15 à 25 ans, attirant 28 millions de personnes chaque mois dont 11 millions qui s’y rendent quotidiennement. Son influence n’est pas que française puisqu’il est le 7ème site le plus visité au monde ! Instagram est devenu le meilleur ami de la femme jeune : 70% des femmes consommatrices préfèrent ainsi Instagram à tout autre réseau social.

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ces utilisateurs sont actifs : 100 millions de photos et vidéos rejoignent chaque jour l’immense photothèque du réseau social. Imaginez le nombre de photos de plats gourmets, des dernières tendances mode, d’animaux ou encore de selfies de stars. Mais comment les utilisateurs peuvent se retrouver parmi cette immensité de publications ou propulser leurs publications au plus grand nombre ? Par l’utilisation des hashtag. Par ailleurs, sur le podium des hashtag les plus populaires, nous retrouvons #fashion qui concentre à lui seul plus de 780 millions de publications, seulement dépassé par le #love (1.7 milliard) et #instagood, qui ne veut in fine pas dire grand-chose mais montre toute la puissance du réseau social.

Au-delà d’un réseau social de partage, Instagram est aussi devenu une entreprise bien lucrative et un nouveau moyen pour les marques d’atteindre leur cible, de manière gratuite par une stratégie de contenu, mais aussi payante via de l’achat d’emplacement publicitaire ou le recours à des influenceurs. Dans le monde, plus d’1.5 millions de publications émaneraient des influenceurs, qui considèrent cette plateforme comme la plus performante en termes d’engagement. Autre chiffre intéressant pour démontrer le business d’Instagram : en 2018, 7 hashtags sur 10 concernent des marques.

Comment Instagram a bouleversé les codes féminins ?

En moins de 10 ans, Instagram s’est imposé comme figure de proue de l’empire de la mode et de la beauté, apportant une véritable révolution et une certaine démocratisation, bien au-delà de la presse spécialisée dont Glamour faisait partie.

Selon une étude, presque la moitié des instagrammeurs suit au moins une marque de mode sur le réseau social. Dans ces utilisateurs, un certain nombre d’entre eux sont des passionnés qui cherchent de nouvelles idées ou simplement suivre les nouvelles tendances. Ils sont aussi beaucoup plus actifs que la moyenne des utilisateurs, avec trois fois plus de posts et une communauté beaucoup plus influente (230% d’abonnés en plus). Aujourd’hui, près d’un post sur deux concerne la mode ou la beauté.

La mode vit par et pour Instagram. Alors qu’autrefois, les défilés & évènements fashion week étaient réservés à une certaine élite, aujourd’hui tout est disponible sur Instagram en direct. Une vraie démocratisation. Les marques, qu’elles soient de haute couture, encore peu connues ou accessibles à toutes et tous, voient en ce réseau social un moyen de promouvoir leurs collections et d’inciter à l’achat, sur leurs propres fil d’actualité ou par le biais d’influenceurs et/ou d’annonces sponsorisées, et ce à des cibles larges mais néanmoins très pertinentes grâce à la segmentation de l’audience. Ainsi, le recours au magazine papier afin de communiquer sur sa marque apparaît comme un investissement de second plan, moins rentable et moins populaire qu’Instagram qui permet de développer le social selling, et donc de calculer directement le ROI de leurs campagnes. Et pour les utilisateurs, ils bénéficient aujourd’hui d’une information plus facilement accessible, sans avoir à payer pour accéder aux dernières tendances mode, contrairement à la presse papier, hormis quelques magazines gratuits avec notamment Stylist, en distribution gratuite.

L’autre avantage non négligeable d’Instagram est sa diversité : pas de diktat sur la morphologie, le beach body, la couleur de peau… Toutes les femmes y sont représentées, on ne reste pas dans le cliché des magazines avec un mannequin blanc et très mince. Sur Instagram, les influenceuses sont en nombre (86% des influenceurs sont des femmes) et jugées bien plus représentatives que le contenu des articles de magazines, souvent centrés sur le postulat paradoxal « profite de la vie mais fais attention à ta ligne ». En 2020 et face à une libération de la parole féminine, les discours vus et revus de la presse féminine déplaisent, au profit de la parole jugée plus authentiques des influenceurs, et in fine des marques de mode. Ainsi, les utilisateurs se reconnaissent d’avantage dans l’univers d’Instagram.

Pour « survivre » face à cette montée en puissance, la presse féminine a investi sur le réseau social en y instaurant une stratégie de contenu, plus ou moins gagnante. Le but premier étant de donner envie d’acheter leur magazine, elles y partagent leurs couvertures de magazines et certains articles. De plus, afin de fidéliser leurs lectrices, du contenu inédit et plus dynamique y est posté, comme des vidéos des défilés, des interviews de stars. Mais, face aux influenceuses, leurs comptes ne pèsent que peu : 111 000 abonnés pour Glamour contre 5 millions d’abonnés pour EnjoyPhoenix, plus de 3.5 millions pour Caroline Receveur ou encore près d’1 million pour Noholita, 3 figures emblématiques du moment. Instagram est aujourd’hui devenu un magazine féminin 2.0, où le contenu est illimité.

Pour retrouver le chemin de la croissance, les magazines féminins ont du pain sur la planche et doivent se renouveler, s’ils ne veulent pas être absorbés par Instagram. Néanmoins, certains magazines qui s’adressent à une cible plus âgée ou spécifique s’en sortent mieux. C’est le cas de Femme Actuelle ou encore Elle, le premier ayant opté pour une ligne éditoriale en phase avec les attentes sociétales d’aujourd’hui et un virage vers le digital. Aussi, certains magazines plus féministes que féminins font leur apparition et ont le vent en poupe avec un discours plus authentique, éloigné des standards de beauté comme Causette, le magazine « plus féminin du cerveau que capiton ».

Quid du reste de la presse écrite ?

A l’instar de la presse féminine, tout l’univers de la presse écrite ne rencontre plus le même succès qu’autrefois. Le numérique est bien évidemment le premier pointé du doigt. Il y a une dizaine d’années, les titres de certains articles ne laissaient pas de place au doute : Internet tuera la presse écrite.

10 ans plus tard, quel est le constat ? Les ventes de presse écrite ont considérablement baissé mais les principaux acteurs restent présents. Selon Laurent Joffrin, directeur de publication à Libération, « le futur de la presse s’annonce incertain, mais pas lugubre, il nécessite une adaptation mais l’information n’a jamais été autant diffusée et consommée qu’aujourd’hui, avec l’essor du numérique ».

Les Français restent par ailleurs très attachés au papier : selon une étude de Publicis de 2017, 80 % des Français sondés préfèrent lire un magazine en version papier plutôt que sur un support digital, et ce chiffre s’élève à 59 % pour les journaux. Néanmoins, cette tendance va-t-elle perdurer avec les nouvelles générations ?

Certains domaines sont plus touchés que d’autres, à cause d’Instagram mais pas que. Le secteur du tourisme, du sport, encore plus depuis le confinement, ou de la décoration sont aussi très présents et Instagram s’impose comme prescripteur, notamment dans le choix de nos prochaines vacances. Cette tendance touche aussi d’autres réseaux sociaux : Instagram est au magazine féminin ce qu’est Pinterest aux magazines de décoration.

Instagram : vers un contenu insipide ?

Bien qu’Instagram présente des chiffres imposants, il est de plus en plus contesté et certains utilisateurs regrettent une trop grande homogénéisation des contenus avec énormément de placement de produits qui polluent l’expérience utilisateur. Aussi, au royaume du beau, la recherche infinie de la perfection et de l’instagrammabilité exaspère un peu plus chaque jour et pèse probablement un peu trop sur le dialogue sociétal. Ainsi, deux tiers des 18-34 ans déclarent que l’instagrammabilité de leur lieu de vacances est leur critère de choix numéro 1. Selon certains psychologues, Instagram mettrait fortement à mal l’estime de soi, et ce en partie à cause du rôle de « femme parfaite » qu’endossent les influenceuses les plus populaires. Le mouvement Instagram VS Reality prend de l’ampleur pour montrer du doigt ces dérives et consiste à comparer une photo instagrammable et une autre qui représente d’avantage l’envers du décor.

Beaucoup d’utilisateurs dénoncent aussi les produits sponsorisés, mis en avant par les influenceurs et qui sont parfois dangereux ou déconseillés. Et, alors qu’Instagram était apprécié par son authenticité et sa diversité, il tend vers une certaine homogénéité qui rappelle avec amertume le discours des magazines de mode. Les images sont jugées comme transparentes, trop parfaites.

Instagram pourrait-il alors être en perte de vitesse ? Comment le réseau social va-t-il s’adapter à ces nouvelles tendances ? Est-il réellement en danger ?

Dans ce souffle, Instagram cible un changement d‘image petit à petit. Par conséquent, les visuels faisant la promotion de produits amincissants sont masqués aux adolescents de moins de 18 ans. D’autres pistes sont également explorées pour assainir son image, comme le fait de masquer les likes, ce qui ne ravit pas les marques ni les influenceurs. Les prochains mois s’annoncent alors source de changement et équilibrage vers une image plus saine, tout en conservant une certaine profitabilité pour les influenceurs et entreprises.

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Article écrit par Clémence Dufour, Associate Consultante, membre de la BCOM Marketing Digital chez Beijaflore Digital;

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